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Internet met-il en danger le commerce traditionnel en Afrique ?

Dernière mise à jour : 13 oct.


Dans un contexte de marché du digital en pleine ébullition, l’e-commerce est en train de transformer les habitudes d'achat des consommateurs en Afrique, ce qui pourrait redouter la diminution, voire la fin du commerce de proximité et des hypermarchés . Pourtant, ces deux modes d’achats seraient en mesure d’offrir une parfaite cohabitation et une grande complémentarité sur le continent.

Faut-il craindre la disparition progressive des commerces de proximité et de la grande distribution au profit du commerce en ligne ? Il est difficile de donner une réponse globale; tout dépend du niveau de développement des infrastructures du numérique dans chacun des pays d’Afrique.

« Lorsqu’on regarde l’infrastructure Telecom de notre pays - à la fois en 3 G et en 4G - , le Maroc a fait des pas énormes dans ce domaine avec l’installation de la fibre optique, et aussi au niveau des applicatifs à plusieurs niveaux ». Prononcés par Moulay Hafid Elalamy, ministre marocain de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique lors de la séance inaugurale de la 2ème édition de Cyfy Africa le 8 Juin 2019 à Tanger, ces mots peuvent donner un aperçu de l'état des lieux du commerce en ligne dans le royaume chérifien.

Classé 5e en Afrique et 81e dans le monde sur les 151 pays listés par le dernier rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), basé sur l’indice du commerce électronique d’entreprise à consommateur (B2C), le Maroc a très vite compris la nécessité de faire du commerce électronique un véritable enjeu de développement économique et de croissance.

Cette excellente performance tient pour une part importante à son taux pénétration Internet évalué à 61.6 %, un nombre relativement très élevé par rapport à la moyenne continentale, soit 35,9%, ( 55.5 % au Nigeria et 53.7 % en Afrique du Sud à titre de comparaison) selon le site Internet World Stats, des chiffres établis au 31 Mars 2019.

« Nous constatons que le citoyen marocain est vraiment connecté. Son mode de consommation est en pleine transformation [...] Avec une croissance à plus de 50% annuelle et près de 13 millions de Marocains qui ont acheté sur Internet en 2018, cette transformation de la consommation, de production et de commercialisation, a atteint l’ensemble des couches de la population [...] » explique Moulay Hafid Elalamy, dans son intervention lors de ce forum sur le digital.

Le Centre monétique interbancaire (CMI) abonde en ce sens, indiquant dans un récent rapport que le pays enregistre un bond de ses transactions Internet via des cartes bancaires marocaines et étrangères de 187 %, passant de 786.000 à 2,2 millions opérations entre le premier trimestre de l’année 2016 et la même période en 2019, avec une forte dominante en cartes marocaines à hauteur de 97,3% en nombre de transactions, en grande partie dans les domaines de la grande distribution, les hôtels, les restaurants et l’habillement.

Force est de reconnaître que les transactions via les sites de commerce en ligne présentent de nombreux avantages : nombreuses remises et promotions permanentes, grande diversité de produits et de marques, consultation en ligne des avis-clients sur un produit donné, relation-client quasi instantanée etc ...

Inquiétude sur les risques de fermeture des commerces de proximité

Eu égard à l’essor du e-commerce qui a engendré une recomposition profonde des formes d’offre commerciale, l’évolution des pratiques quotidiennes des consommateurs fait redouter une disparition progressive de supérettes, épiceries et autres magasins d’approvisionnement général. Cela est d’autant plus vrai au Maroc, un pays où les habitants demeurent très attachés au commerce de proximité, un secteur qui couvre près de 80% des points de ventes sur tout le territoire national.

« [ ... ] On constate que les jeunes n’achètent plus de clé USB en local. Ils se la font livrer de Chine dans de petites enveloppes. Qu’adviendra t-il de ce commerçant de proximité ? [ ... ] » fait remarquer le ministre, se basant sur une étude diligentée par la Poste du Maroc.

La vague du commerce électronique est toutefois moins susceptible de susciter une crainte raisonnable dans un bon nombre de pays d’Afrique subsaharienne, car le nombre d’utilisateurs Internet y est très faible : 6,318,355 en Côte d’Ivoire, 9,749,527 au Sénégal, 6,128,422 au Cameroun, 3,724,678 au Rwanda ( contre 49,231,493 en Égypte, 22,567,154 au Maroc ou 21,000,000 en Algérie ) d’après les chiffres d’Internet World Stats au 31 Mars 2019.

Ajouté à cela le taux de bancarisation nettement bas qui ne permet aucunement de faire émerger une masse critique d'acheteurs en ligne globalement sur le continent africain, ainsi que les problèmes de logistique et de transport. Des difficultés auxquels des plateformes, à l’instar des filiales de CDiscount en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Cameroun, n’ont pas su faire face, ce qui explique le dépôt de bilan de ces structures. De ce fait, la vente au détail pratiqué dans les rues ou quartiers commerçants des villes a encore de beaux jours devant lui en Afrique.

L' e-commerce, source d’opportunités pour le continent africain

« Toutefois, la digitalisation qui a permis cet e-commerce est en elle-même une aubaine sans précédent pour le Maroc et pour l’Afrique en général » souligne Moulay Hafid Elalamy.

Quelques lueurs d'espoir apparaissent donc à l'horizon si l'on s'en tient aux bonnes pratiques à l’international, un constat qui peut conforter l'afro-optimisme du ministre de l'Industrie, du Commerce et de l'Économie numérique.

« Moulay Hafid Elalamy, ministre marocain de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique, a affirmé que les réalisations de l'Inde en matière de transformation digitale sont sans précédent et que son modèle doit être transposé au monde entier, notamment au continent africain ».

Par ailleurs, l’Afrique pourrait s’inspirer des modes de partenariat, notamment en prenant des exemples de collaboration entre le groupe français de la grande distribution “Carrefour” et le géant chinois de la technologie “ Tencent”, entre l’Américain “ Walmart ”et “Flipkart”, une plateforme e-commerce leader sur le marché indien ou bien entre le site “Amazon” et la chaîne de distribution alimentaire“ Whole foods”, des enseignes qui s’inscrivent dans une démarche ominicanale en adoptant le “click and collect” , c’est-dire en donnant l’occasion aux consommateurs de commander de la marchandise sur internet et retirer et payer en magasin. Un système gagnant-gagnant qui permet de faire coexister et pérenniser les activités de plateformes de transactions en ligne, de commerce de proximité et de la grande distribution.

 

Par Harley McKenson-Kenguéléwa

 

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